mardi 30 juin 2015

Forêt de Rambouillet

Avant de raconter cette étape, j'aimerais dire un mot sur mon nouveau mode de vie depuis que la canicule s'est installée.

En temps réel, je suis à Beaulieu-sur-Loire et j'ai mis au point quelques techniques de lutte anti-chaleur avec les moyens dont je dispose.

D'abord, je ne roule que le matin pour ne pas tomber les bras en croix incrustés pdans le goudron.

Pour aller plus vite, je ne suis plus le navigateur, seulement les petites routes jaunes.

Les cimetières sont devenus mes meilleurs amis : calme, eau fraîche
à volonté pour boire et s'asperger.

Je pratique aussi abondamment les églises, fraîches, silencieuses, sombres. Quelle paix dans le fracas du monde ! Encore faut-il qu'elles soient ouvertes !

La trouvaille dont je suis le plus fière : aux heures les plus chaudes de l'après-midi, je m'allonge en sous-vêtements sur mon matelas, me recouvre de mon sac à viande en soie bien trempé et, pour rafraîchir le tout, mon appareil anti-apnée en guise de ventilateur. Il me reste juste à trouver le moyen de  l'accrocher au plafond
et je survivrai, foi de cycliste !

Revenons à Rambouillet : il existe dans la forêt (la vraie, pas comme le bois de Boulogne)  un camping dénommé Huttopia, avec de jolies tentes, cabanes et autres roulottes pour citadins en mal de vie "nature". Tout est en bois, pas de hideux mobil-homes, et il y a même une piscine naturelle avec une eau verte du plus bel effet. Dommage que je n'aie pas de maillot !

lundi 29 juin 2015

Versailles

A Versailles, je suis attendue chez Reine - c'est bien normal. Elle a mis les petits plats dans les grands, préparé un poulet au vin du Jura et à la crème, et invité sa famille parisienne.

Les souvenirs reviennent en foule. Avec 50 ans de décalage, tout ce qui faisait notre quotidien des années 60 paraît délirant. Tant de règlements militaires et injustes, tant de vexations nous ont forgé un catactère d'acier, c'est au moins ça.

Reine est à la recherche d'un habitat partagé pour ses vieux jours. C'est la formule de l'avenir, qui me tente aussi.

En attendant, nous décidons de nous retrouver pour fêter joyeusement nos 70 ans dans 3 ans.

Le lendemain, je quitte Versailles par le parc du château, sur un chemin qui passe devant le Petit Trianon. Un petit salut à Toinette, et en avant pour la forêt de Rambouillet !

Mise à jour


Je suis aujourd'hui en temps réel près de Montargis et je vais tenter de rattraper le retard dans mon récit.

Derniers jours à Paris : pleins comme des oeufs.
Avons tenté en vain d'entrer à la Philharmonie pour la 9e de Beethoven, mais la queue interminable a été interrompue juste devant nous. Quand on sait qu'il y a des milliers de places, c'est stupéfiant.

Le long des canaux se baladait la foule décontractée d'un dimanche estival. Pas de circulation, enfin !

Ai tenté de renouveler ma garde-robe technique dans un Décathlon où l'on m'a dit que les vêtements féminins étaient vendus dans un seul magasin à l'autre bout de Paris ! Trouvé une paire de chaussures cyclistes à ma taille qui me donnent l'impression de voler. Utile dans les côtes ! Mais le short italien attend avec impatience d'être remplacé.

Dernière après-midi à la Cité du Cinéma (Luc Besson) pour l'exposition Harry Potter des costumes et accessoires des différents épisodes. Un peu décevant pour qui a seulement lu les livres en anglais. Les noms sont beaucoup moins drôles en français. Mais les costumes sont bien délirants comme il faut. Bien aimé la cabane de Hagrid, le géant débonnaire. Me suis étouffée de rire en voyant dans une vitrine un jeu de quidditch de table (jeu de ballon qui se joue en l'air sur un balai de sorcière).

Dernier soir et dernière réunion de famille avec ma cousine Caroline.

Enfin, j'ai récupéré mon attelage chez le réparateur devant Béatrice et José médusés, pour affronter la sortie sud direction Versailles. Un  trajet beaucoup moins bien équipé de pistes cyclables et bien stressant. Mais que ne ferait-on pas pour retrouver une vieille copine d'internat  (je rappelle aux jeunes générations qu'à cette époque reculée, internat signifiait "maison de redressement") ?

jeudi 25 juin 2015

Paris encore

Sans l'avoir calculé, j'arrive à Paris au moment de la Fête de la Musique. Pour moi qui rêvais de voir la Maison de la Radio et la Philharnonie, c'est un vrai cadeau !

J'arrive quai Kennedy par le bus 72, un véritable bus touristique. Jugez plutôt : rue de Rivoli, Palais Royal, Tuileries, Concorde, Grand Palais, Tour Eiffel, Trocadéro, Maison de la Radio (le cordon ombilical des provinciaux).

La Maison de la Radio organise des répétitions publiques des concerts de demain de l'orchestre National de France. Il suffit de demander un billet gratuit et de s'installer dans le grand auditorium.

Arrive le premier chef, Sasha Goetzel, anglophone, énergétique. Il ne prend pas la peine de parler français mais mime beaucoup.Pendant ce temps, les musiciens se transmettent les infos vaille que vaille. On est comme dans un aquarium, baigné dans le son, traversé par les ondes. Le son est répercuté par le revêtement de bois en forme de reliures de livres. Le public, très attentif, applaudit à tout rompre les airs connus : Carmen, la Danse du sabre, le Boléro. On dirait qu'après ce bain, le corps est remis â l'heure, comme régénéré de l'intérieur.

L'après-midi, nouveau cadeau du hasard, c'est Myung-Whun Chung
en personne qui vient diriger le Requiem de Verdi. Il arrive à l'heure, parle très bien français, ne fait aucun geste inutile, dirige assis.

Entre-temps, des artistes décorent des pianos installés dans le hall, tandis que des accordeurs les accordent. C'est pour le public de demain, qui pourra pianoter à son aise. Il y a de la musique partout, dedans et dehors.

Le soir, on se balade dans les quartiers "village" de Paris : la butte Bergeyre, les Buttes Chaumont, les petits coins tranquilles de Belleville. Au retour, dans le quartier du Père Lachaise, notre attention est attirée par une soupe populaire d'un genre spécial. Tous les bénévoles portent un gilet fluo marqué "Amatullah". Les Frères musulmans sont-ils parmi nous ?

mercredi 24 juin 2015

Paris, tu m'as pris dans tes bras

Béatrice et José m'hébergent et me font découvrir Paris.

Et nous voilà partis, José et moi, à l'assaut de Saint-Denis, bigarrée et solennelle. Il y a un moment que j'avais envie de voir la basilique, et surtout les tombeaux et les gisants (appelés aussi "transis") des rois de France. Exactement depuis que j'ai vu cette vidéo hallucinante sur le traitement infligé aux ossements des rois pendant la révolution.

https://m.youtube.com/watch?v=uslyMkZM_rQ

Le décalage entre ce récit de folie et la solennité des lieux me fascine. La jeune guide, un peu inexpérimentée, nous explique les nombreux symboles. Sous les pieds des reines, un chien représentant la fidélité (à Dieu), et sous ceux des rois, un lion représentant la foi. Devant nous, une rosace d'un bleu surnaturel. Il y a une crypte qu'on visite rapidement et puis on sort au soleil, un peu sonnés par toute cette majesté.

Je décide d'emmener José à 50m de là. Adossée à la basilique se trouve l'école de la Légion d'honneur, que j'ai promis à mon amie Joëlle d'aller voir, en souvenir de ses nombreuses années d'incarcération dans cet endroit sinistre. Immense porte close, fenêtres austères à barreaux, l'endroit n'inspire pas l'allégresse. La discipline était de fer. Pour seule distraction, les Jeux olympiques à la télévision...

Mais surtout, mon amie se souvient d'une histoire terrible arrivée à une de ses camarades d'infortune. Cette excellente élève remontait se changer après un cours de tennis en jupette : elle a été "dégradée" devant toute l'école pour attentat à la pudeur ! On lui a enlevé sa ceinture d'uniforme comme on enlève les grades d'un militaire traître à la patrie. Ou comment fabriquer des rebelles...
Nous avons quitté les lieux à toutes jambes.

La moitié du tour de Paris

Autre défi de taille : il faut maintenant aller porte de Vincennes laisser l'attelage chez le réparateur pour révision générale. Soit du Nord-Ouest au Sud-Est par les boulevards des Maréchaux, l'ancien périphérique. Eh bien, soyons clair : Paris est la grande ville la mieux adaptée au vélo de mon voyage : il y a des voies cyclistes partout, et même le long des passages piétons aux feux rouges ! La ville intra-muros se traverse comme du beurre.

Mon attelage est un véritable piège à mecs. A un feu rouge, un cycliste très avenant et bien mis me pose mille questions sur le voyage et le vélo et me quitte à regret après avoir laissé passer quelques feux verts. J'en profite pour le suivre à distance et copier toutes ses petites astuces gain de temps, comme ralentir juste le temps nécessaire au passage des piétons et non toute la durée du feu rouge vélo.

C'est que je n'ai pas de temps à perdre. Je dois être gare de Lyon à 12h30 pour embrasser mon cousin Raymond, pas vu depuis 39 ans.

Le réparateur vélo prend note soigneusement de toutes mes doléances et  accepte de garder l'attelage 5 jours, week-end compris. Ouf, libérée ! Je retrouve Béatrice, José et Raymond devant une choucroute et une bière et nous remontons les années à toute allure, train oblige.
La fête commence !

dimanche 21 juin 2015

Ach, Paris !

Les choses sérieuses commencent !

Paris est à une trentaine de kms urbains - inconnus. Ma terreur est immense. Je dois faire entièrement confiance au navigateur (sans entendre ses instructions orales dans la circulation) pour atteindre le camping  situé au Bois de Boulogne, allée du Bord de l'Eau. L'adresse est alléchante et le camping ferme à 1h du matin, ce qui me laisse largement le temps de me tromper.

Après un détour involontaire par 2 chemins impraticables et un camp de Roms, sans compter mille arrêts vérificatoires, je parviens au camping au bout  de 6 heures. Ouf, je peux décompresser !

Mais les mauvaises surprises se succèdent. Le camping est au bord de la route à grande circulation qui traverse le Bois. Pour avoir l'électricité, je dois prendre une place de camping-car à 37,50 € (record absolu de mon voyage), un concert en plein air démarre à 22h de l'autre côté de la route, tandis que les joyeux campeurs entament une partie de pétanque enthousiaste à 22h30. Ah, et on ne voit pas la moindre goutte d'eau dans le paysage !

La certitude qu'un cycliste anglais partage la même misère non loin de moi m'aide à m'endormir.

Auvers-sur-Oise

La ville est un peu décevante par rapport aux peintures éblouissantes de Van Gogh. Mais la mairie pavoisée du 14 juillet est la même, tout comme l'auberge Ravot, où il avait pris pension et où il s'est suicidé. L'auberge est devenue un restaurant réputé et la pension "la Maison Van Gogh". On visite sa chambre, minuscule et nue, en spéculant sur ses dernières heures.
Je grimpe à la fameuse église bleue, d'une banalité à pleurer, et lui tire le portrait dans le même angle que Van Gogh, pour comparer. Pas de doute, Vincent est le meilleur !




Cergy-Pontoise (2)

Eh oui, je me suis faite à la dure réalité : pour atteindre Auvers-sur-Oise, il faut passer par Cergy, petit avant-goût de la banlieue parisienne.

Je m'en suis fait une telle montagne que je n'ai pas imaginé pouvoir arriver à Auvers (à 8 km) dans la journée, et, faute de camping, je vise un hôtel. Malheur ! Tout est complet à cause de je ne sais quel congrès. Je finis par dégoter un "Première classe" qui n'a de première classe que le nom et le prix, et je découvre la vie de Cergy.

Tous mes clichés sur la banlieue volent en éclat. C'est une ville où il fait bon vivre. Les rues sont larges, ombragées, il y a des pistes cyclables partout, les immeubles ne sont pas très hauts et sont très bien entretenus, pas de jeunes pour tenir les murs, tout le monde semble vaquer à ses occupations. Les immeubles sont reliés entre eux par des galeries couvertes, avec  magasins, petits restaurants et bars, bibliothèques, où tout ce petit monde bigarré se retrouve dans un joyeux tohu-bohu. Le kebab où je dîne somptueusement pour 8 € m'offre le thé à la menthe final.

Les jeunes employés de l'hôtel sont captivés par mon entreprise et ne me lâchent plus. Leurs yeux deviennent rêveurs à l'idée de tous les voyages qu'ils pourraient faire. Je pense qu'ils ne sont jamais sortis de Cergy.

samedi 20 juin 2015

Cergy-Pontoise

Le parc naturel du Vexin est un régal pour le cycliste non chargé. Mais mon Grand Navigateur s'emploie une fois de plus à le transformer en Koh-Lanta pour Sysiphe de la remorque, au lieu de me laisser caresser le bitume des petites routes pèpères.

Par chance, un ange gardien en chair et en os me récupère au bord de la crise de nerfs et me fait entrer au frais chez lui pour examiner tranquillement les itinéraires sur internet. C'est un cycliste, il n'a donc aucun problème pour repérer les petites routes roulantes et tranquilles idéales pour arriver à Cergy dans un fauteuil roulant. Qui que tu sois, ô Saint-Antoine des routes perdues, sois béni !

vendredi 19 juin 2015

Giverny

Ah ! La maison de Claude Monet, j'en rêvais depuis longtemps, depuis que je m'étais délectée d'un livre de ses recettes de cuisine illustré de photos somptueuses de la maison et du jardin.
Mais horreur, il y a foule dans le village, des Japonais, des Anglais, des enfants en voyage scolaire... Il y a même un couple d'Asiatiques qui se marie et qui fait sensation. Une queue se forme devant la maison, des employés canalisent les visiteurs. Je suis près d'abandonner, quand Claude en personne m'invite dans son atelier et dans sa cuisine.
La maison est bien telle que je l'imaginais, basse de plafond, intime, douillette, chaleureuse, campagnarde, faite pour une famille nombreuse. C'est celle que je veux quand je serai grande ! Mais je rajouterai des salles de bain.
Le jardin déborde de fleurs. Il y en a même trop à mon goût, les couleurs finissent par se tuer les unes les autres, tout cela manque un peu de verdure. Sur le petit pont aux nymphéas, il y a foule et pas d'espoir de tranquillité.
Sus à Auvers-sur-Oise !

Gerberoy

Une des bonnes surprises du voyage. Ici, tout le monde connaît et pratique Gerberoy, un village médiéval débordant de roses de toutes espèces et couleurs. Tout embaume. Les gens se baladent dans les rues, se penchent sur les roses, hument, comparent les parfums, les couleurs. Beaucoup d'Anglais. C'est la saison idéale. Aujourd'hui, 2 concerts sont organisés et le village bruisse d'activité.
Je m'attarderais bien, mais 37 km m'attendent pour l'après-midi. C'est un camping au bord d'un lac. En arrivant, j'apprends que ce lac idyllique est une ancienne carrière de sable et que la baignade y est interdite. Motif : des poches de gaz se sont formées qui aspirent les nageurs, et ils disparaissent. Brrrr...

mercredi 17 juin 2015

Marseille-en-Beauvaisis

Trajet enchanté de visions magiques des champs de lin en fleurs. Le camping est comme toujours un petit village de mobil-homes qui n'a nul besoin de campeurs dans son bonheur tranquille. Vivement les vacances, qu'on retrouve les vrais voyageurs !
Je me prépare à un dîner au village aussi morne que ma bière ponctuée de rires gras, quand je découvre une crêperie qui va me changer de mon ordinaire.
A l'extérieur, rien ne transpire, tout est très confidentiel. Il faut entrer dans un immeuble, monter quelqes marches usées par les siècles, ouvrir la seule porte visible et l'on pénètre dans un restaurant qui ressemble à ma maison idéale (je n'ai pas encore vu celle de Claude Monet). Tables et chaises de bistro dans leur jus, bougies allumées partout, peinture pistache et grenat, partout des tableaux et des détails charmants, mais la seconde pièce, réservée aux habitués, est encore plus intime et douillette, avec sa bibliothèque remplie de livres anciens. Les toilettes d'époque sont dans un jardin "de famille" fleuri.
Ici on se sent bien et la discussion, passionnée, s'engage sur les voyages. Une chaude ambiance s'installe, des confidences s'échangent. Comme c'est bon ! Pour finir, la patronne m'indique un chemin romantique pour rentrer au camping en rêvant au soleil couchant. Quelques kilomètres de bonheur pur...

mardi 16 juin 2015

La bête est toujours vivante...

... mais bien lessivée par la région parisienne qui s'ajoute aux côtes du Vexin.

Demain, j'arrive à Auvers-sur-Oise et je dis tout ! Promis sur la tête de ma dernière paire de chaussettes !

samedi 13 juin 2015

Au fil de la route

Ce matin, je quitte mon étape de Conty, au sud de la Somme. La journée commence par une montée de 6 km, la plupart du temps à pied.
Tout en haut, dans le village de Belloise, une femme d'une cinquantaine d'années se met en travers de mon chemin d'un air engageant. Elle me dit qu'elle m'a vue ce matin en bas et me félicite d'avoir monté toute cette côte à vélo. Je lui ôte tout de suite ses illusions, mais elle reste admirative et me propose de m'aider et de m'héberger, car elle a lu des livres de voyageurs et a beaucoup d'empathie pour les difficultés de l'entreprise.
S'il était 4h de l'après-midi, je lui aurais sauté dans les bras, mais la journée s'annonce belle. Je la remercie chaleureusement et lui raconte qu'un jour, alors que la pluie commençait, j'ai eu un refus net dans une chambre d'hôtes, sans explications. Ce jour-là, je me suis sentie "Auvergnate"...

vendredi 12 juin 2015

Amiens

La cathédrale est une oasis de fraîcheur dans cette touffeur. L'extérieur : un pur délire de sculptures et de décorations, très harmonieux et inspiré. Des tas de gens restent devant, médusés par une telle splendeur et une telle richesse. On se demande comment la cathédrale a pu survivre à tant de guerres et à la révolution.
On n'en finirait plus de détailler l'intérieur, ses vitraux, ses dorures, ses gisants, et surtout sa hauteur stupéfiante, mais j'étais venue pour voir (et pratiquer) le labyrinthe noir et blanc dans la nef centrale. Caramba ! Encore raté ! Le sacristain m'explique que malheureusement, il est recouvert de chaises à cause des communions de dimanche dernier et dimanche prochain. Encore une destination à rajouter à mon futur tour de France en voiture...
On ne peut venir à Amiens sans voir les hortillonnages, des jardins dans un réseau de canaux et bras de rivière qu'on visite en bateaux plats. C'est superbe, paraît-il, mais j'arrive à l'heure de fermeture, et les foules déversées ne donnent pas trop envie. Je me contenterais d'un petit tour à pied.
Il me faudra une demi-journée pour sortir de la ville, mais â quelque chose malheur est bon : dans l'interminable zone commerciale qui me sépare de la campagne se trouve un Décathlon recelant un trésor : la bonbonne de camping-gaz qui me manquait depuis plusieurs jours pour ma bouillie matinale.

jeudi 11 juin 2015

Jour sans

On me demande de tous côtés comment était le restaurant de Long. A se relever la nuit ! Vue en surplomb sur la Somme au soleil couchant, bonne musique, plats originaux faits maison. Peu de monde, mais c'est parce qu'il est conseillé de réserver. J'ai tenté un grand coup : camembert grillé aux amandes et raisins, avec pommes de terre sautées, salade et fines tranches de charcuterie, le tout délicieux et roboratif. Je recommande le détour. C'est ma formule bien rodée : matin : Ricoré et flocons d'avoine, midi : sandwich, soir : plat unique et carafe d'eau. J'en suis venue à ne plus aimer les desserts, qui l'eût cru ?
A la sortie m'attend une surprise : Yang a encore crevé. Je crois qu'il en a assez des pistes hasardeuses au bord de la Somme, magnifiques au demeurant. A Paris, je m'occuperai de changer les pneus et les freins. Pour l'instant, l'homme à tout faire du camping a réglé le problème de bon matin.
Ce matin, il fait une douceur suspecte. J'ai même transpiré cette nuit, du jamais vu ! La chaleur est bien là. Le temps d'arriver à Amiens, je suis une loque, j'ai mal à la tête. Les employées du camping me donnent un grand verre d'eau et une serviette mouillée. J'avais juste oublié de boire, un vieux réflexe de l'ère glaciaire.
Une de ces journées où on se pose beaucoup de questions sur sa motivation...

mercredi 10 juin 2015

Long

C'est le nom de mon étape de ce soir, dans la Somme. Depuis mon départ sur les routes, j'en ai rencontré, des villages morts, mais celui-ci remporte un prix spécial.
Il a dû connaître une certaine grandeur, car il possède un château du XVIIIe avec de magnifiques serres, une église et son orgue Cavaillé-Coll - s'il vous plaît - une belle mairie à beffroi. Mais pas d'épicerie, tabac, café, journaux, bref tout ce qui fait la vie. Rien que des voitures qui se croisent au carrefour...
Alors les jeunes pétaradent et tiennent salon dans l'abribus, et moi, j'ai dû aller mendier une bière au camping concurrent du mien !
Heureusement, il y a un restaurant dont j'attends l'ouverture avec impatience. Peut-être tout le village va-t-il se rencontrer ici ce soir ?

mardi 9 juin 2015

Fort-Mahon

C'est décidé : Fort-Mahon sera mon apothéose, mon apogée, mon acmé. Un peu de peur, beaucoup d'excitation. Un vieux rêve qu'il est important de confronter à la réalité : le char à voile.
Je prends rendez-vous avec un moniteur pour demain matin à marée basse, trouve une chambre pour me remettre du vent glacial qui n'a cessé de me harceler toute la journée et me couche dans l'attente heureuse d'une veillée de Noël.
A 10h30, je suis au taquet, empaquetée dans mes vêtements imperméables. Arrive un jeune homme aux yeux bleus à se noyer dedans, gentil comme tout, qui m'explique tout et répond à toutes mes questions. C'est une séance d'initiation de 20 mn dans un char biplace conduit par lui.
L'aller, sur plusieurs kilomètres, se passe à rouler contre le vent. On prend le vent en faisant des diagonales sur la plage (tirer des bords), sur sable humide et dur, tout en franchissant allègrement des ruisselets qui vous éclaboussent d'eau, pendant que le vent saupoudre le tout avec du sable.
Un ou deux ensablements plus tard, c'est le retour vent arrière à une allure de folie, encore plus vite que dans mes rêves. On arrive trempé, soûlé de vent, de sel, de sable, et juste l'envie de recommencer, encore et encore !
J'essaye de joindre 2 vidéos pour vous mettre dans l'ambiance !
Eh bien non, ça ne marche pas, on ne peut pas joindre de vidéo, seulement des photos. Dommage...

Baie de Somme

A Saint-Valéry-sur-Somme, le camping est sommaire, mais le personnel très serviable et les prix imbattables. Parfait pour 2 nuits.
La baie est bien là, paisible, plate à l'infini. On distingue en face Le Crotoy dans la brume. Ambiance aquatique, rêveuse. On médite sur la finitude des choses et l'infinitude du monde.
Beaucoup de monde sur la promenade du bord de mer, mais l'ambiance est calme et contemplative. On apprend par des panneaux que Colette, Anatole France et Victor Hugo ont trouvé l'inspiration ici.
("Ô combien de cyclistes, combien d'aventuriers,
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines").
C'est d'ici que Guillaume a embarqué pour conquérir l'Angleterre.
Dans la ville, c'est plutôt Saint-Tropez. Pétarades de Harley, voitures sport décapotables, il faut se montrer. Saint-Valéry est très tendance. D'ailleurs j'apprends que ce soir même, est diffusé à la télé un reportage sur la baie. Mais on peut échapper à la folie en grimpant dans la vieille ville assoupie avec sa curieuse église à damiers noirs et blancs.
Je décide de consacrer cette journée de repos à faire le tour de la baie en petit train à vapeur, de Saiint-Valéry, au sud, au Crotoy, au nord.  Nous sommes dans des wagons en bois verni de 3ème classe. Le train est plein de gens joyeux. C'est très bon enfant. Chacun regarde de tous côtés et avertit tout le wagon lorsqu'il voit quelque chose, chevaux, oiseaux, motards en train de se faire intercepter par les gendarmes sur une route fermée. On se prend en photo, on s'émerveille de la lenteur du train, qui va aussi vite que mon vélo. Je me détends.
Le Crotoy est beaucoup plus calme et simple. Il y a beaucoup de maisons de pêcheurs en briques peintes. Certaines sont à vendre. Investisseurs : à vos marques !
Le soir, je vois mon premier phoque dans la baie. A peine l'a-t-on remarqué qu'il disparaît.
Pas le temps de faire une balade en bateau, une randonnée ornithologique ni d'aller voir les phoques, mais le lendemain, en remontant vers Fort-Mahon, j'ai ma récompense. Un nombre incroyable d'oiseaux de toutes sortes barbote et criaille dans un marais au bord de la route. A défaut d'appareil photo, je m'en mets plein les mirettes.

lundi 8 juin 2015

Un peu de technologie

Je viens de réaliser que depuis mon départ sur les routes, je répondais scrupuleusement aux notifications de messages (marquées "no reply"). Toutes mes réponses à vos messages se sont donc perdues dans les sables.
Bravo la Sirène !

Reprenons donc à zéro et bientôt, nous serons au top.

Voilà qui devrait mettre du baume au coeur de ceux qui n'arrivent pas à publier un commentaire sur le blog ! A ce propos, un petit conseil pratique de Noémie : avant de publier un commentaire, copiez-le et si vous n'arrivez pas à le publier, collez-le dans votre deuxième tentative, qui, elle, devrait marcher.

Bon sang ! On va y arriver ! Foi de cycliste du Tour de France !

dimanche 7 juin 2015

Veules-les-Roses

Petites étapes presque plates, mais avec beaucoup de routes à grande circulation qui me fracassent les oreilles.
En chemin, je me réfugie dans la très belle église à 2 nefs de Doudeville, puis à l'ombre du cimetière pour pique-niquer amicalement sur une tombe très ancienne.
Veules-les-Roses est  bienvenue pour souffler un peu. Une petite ville sans circulation, qui a la particularité d'abriter le plus petit fleuve de France (1100m). On fait à pied un circuit autour du fleuve qui serpente dans le village. C'est charmant et fleuri. On a à la fois la vie de la campagne et la vie de la mer. Destination recommandée aux amoureux du monde entier !
Mais la bière n'attend pas. Je me réfugie dans un bar et commence à pianoter et à siroter. Soudain, 4 joyeux habitués se lancent un défi au baby-foot et commencent une partie frénétique agrémentée de rires carnassiers. Voyant que je m'intéresse, ils m'invitent et me mettent à l'avant pour limiter les dégâts. Ils ne savent pas, les innocents, que j'ai passé mes 7 ans d'internat à parfaire des coups tordus et se retrouvent laminés sans avoir eu le temps de dire ouf.
La nuit se passe à lutter contre le vent qui fait claquer ma toile de tente comme une voile de débutant. A 1h du matin, me voilà en train d'entortiller la toile extérieure autour des piquets pour limiter la prise au vent. Bien la peine d'avoir acheté une tente neuve, la toile extérieure est trop grande !
Dans 2 jours, la baie de Somme !


Yvetot

Encore une belle rencontre au camping de Pont-Audemer, dès l'aube. Mireille, randonneuse à pied, est prête à lever le camp, et voilà que nous nous lançons dans de grandes considérations sur la vie autour d'un Ricoré. C'est le voyage. Echanges brefs, mais intenses.
Yvetot. Je m'étais imaginé, on ne sait pourquoi, que c'était la ville de Madame Bovary (sans doute parce que Yonville l'Abbaye et Yvetot commencent par un Y). Il n'en est rien, Yonville est purement imaginaire selon tous les experts, et ses modèles seraient plutôt Bussy et Forge-les-Eaux, assez loin d'ici.
Je me voyais déjà, assise à l'auberge d'où partaient les voitures pour Rouen, en face de la pharmacie de Monsieur Homais, à méditer sur la vie rêvée d'Emma.
En fait, Yvetot a été presque entièrement bombardée et reconstruite en damiers. Elle n'a plus rien d'une ville ancienne, et c'est Maupassant qui a sa statue ici. En plus, le camping que je visais n'existe plus.
Une bière plus tard, j'ai surmonté ma déception et je suis prête pour la nouvelle aventure d'une chambre d'hôtes. Mon hôtesse, une "maman de voyageurs" idéale, surgit 5mn après mon coup de fil pour me diriger chez elle.
Réception chaleuteuse, petit déjeuner avec pain maison et grande discussion sur la région que je découvre. Ainsi, j'apprends que le "horsain" est un étranger pas d'ici (hors sein). Le "Bicailloin" est un habitant de Bec-Helloin (encore un étranger). Un talus s'appelait un "fossé". On grimpait donc sur le fossé pour voir passer les étalons décorés et pomponnés pour la saillie. J'apprends aussi que Villequier (Victor Hugo) n'est pas loin d'ici.
J'ai l'imptession que je deviens normande...

vendredi 5 juin 2015

Pont-Audemer

Sur les petites routes normandes, sortes de chemins creux goudronnés, je vois des haras et des voitures anciennes décapotables, conduites par des Anglais très dignes, qui sortent d'un peu partout. Il doit y avoir un rassemblement quelque part. Deauville ? En tous cas, nous voilâ dans une région qui ne manque de rien : belles maisons normandes restaurées, grandes propriétés, voitures pressées. Ambiance de stress pour le voyageur rêveur, il faut te reprendre, Chantal !
Pont-Audemer serait idéale pour cela s'il n'y avait les VOITURES. Il n'y en a que pour elles. Pas de zones piétonnes pour jouir du canal qui transforme la ville en petite Venise, et des maisons anciennes à colombages.
En revanche, un petit miracle : on me signale mon premier réparateur informatique depuis le départ. Et hop ! On change de carte-mémoire et le problème photos est résolu.
Voici donc Pont-Audemer, qui a encore de belles pom-pom-pom-pom-pom-pom-pes funèbres (de nos 20 ans).

jeudi 4 juin 2015

Pont-l'Eveque

Je suis très partagée sur les Pontépiscopaliens.
D'un côté, l'ambiance amicale d'un bar, avec ses clients chaleureux et curieux de partager avec une voyageuse venue de si loin. Des gens fiers que les Parisiens viennent faire leurs courses à la quincaillerie ou à la mercerie de Pont- l'Evêque.
De l'autre, des conducteurs à classer dans les malades mentaux, qui transforment cette petite ville charmante en bruyant gymkana. L'un d'eux a heurté la remorque et disparu le temps que je me gare.
De l'autre aussi un camping, situé dans un centre de loisirs, qui est une véritable arnaque. Plus de 18 € pour un camping sans accueil, sans wifi, sans bar, sans animation, sans rien qu'un carré d'herbe et des sanitaires, je la trouve mauvaise.
Le camping est un village de mobil homes et de camping cars où le cycliste/campeur est une race inconnue. Le client typique joue à la pétanque, bricole, tond sa pelouse, fait sa lessive, la cuisine et la vaisselle. Je me suis longtemps demandé l'intérêt de recréer ainsi la vie d'un pavillon de banlieue en vacances, jusqu'à ce que je comprenne que ces vacanciers vivent sans doute en appartement et réalisent ainsi le rêve de leur vie.
Aucune chance non plus d'être sélectionnée pour le prochain casting annoncé d'un nouveau film sur des nouvelles de Maupassant. On recherche "de beaux jeunes gens de 30-35 ans, des notaires et des médecins de 50-70 ans, des femmes girondes et des femmes de la campagne ayant leur franc-parler".
Soyons juste : il y a une chose qui mérite amplement un arrêt à Pont-l'Evêque : le "paille-framboise", une merveille de légèreté pâtissière fourrée à la confiture de framboise...

mardi 2 juin 2015

Demandez et vous obtiendrez (Cabourg)

J'arrive à Cabourg gonflée à bloc après une nuit dans une roulotte, bien décidée à voir le Grand Hôtel où séjournait Proust en vacances. Celui - le plus confortable de Cabourg  - où il disait avoir enfin la force de sortir de sa chambre et de se promener.
Je tourne devant l'hôtel, essayant en vain de localiser sa chambre, lorsque j'avise un employé en train de laver l'escalier de l'entrée. Est-ce son visage avenant ? Je suppute, confère avec moi-même, surmonte ma timidité et lui demande tout de go si on peut visiter la chambre de Marcel Proust. Si la chambre n'est pas occupée et si je lui laisse le temps de finir son travail, c'est possible. Mais comment donc !
La chambre est libre. Ouf ! Je suis mon guide à travers le hall (tête des clients devant mes cheveux ébouriffés, mon gilet fluo et mon short cycliste !). Je passe la tête haute et nous filons par l'ascenseur au 4ème, direction chambre 414. Plein d'égards, Frédéric me montre la salle de bains style années 30, puis la chambre avec un lit en laiton et mobilier d'époque. Et surtout la vue ! Rien que la mer et le ciel ! Que du bleu ! Frédéric me propose de prendre des photos, mais mon appareil est bloqué. Qu'à cela ne tienne, si je lui laisse mon adresse mail, il m'en enverra. Et il l'a fait !
J'accorde ici solennellement 5 étoiles au Grand Hôtel pour la qualité de son accueil et son sens du service.






lundi 1 juin 2015

Arromanches

Arromanches n'est qu'à une dizaine de km de Bayeux, et déjà on passe devant des plaques commémoratives, des cimetières militaires aux alignements impeccables et interminables. La campagne est riante sous le soleil, un tel carnage est juste inimaginable.

En ville, la  foule se déverse entre musées, boutiques, bars, restaurants. Au large, on voit du béton en arc de cercle que je prends pour des restes de défense allemande. En fait, c'est un port artificiel construit par Churchill pour débarquer tout le matériel nécessaire  après le 6 juin, alors que les ports étaient encore tenus par les Allemands. Des caissons en béton qu'on remplissait d'eau pour qu'ils suivent les marées  et ne soient pas submergés (si j'ai bien compris). Pour consolider le tout, les Anglais  avaient  aussi coulé de vieux navires dont on peut encore voir les coques à certains moments.

Toute cette ingéniosité m'émerveille. J'ai envie d'en savoir plus et je ferai certainement un autre voyage en Normandie.

Quand même, quel paradoxe que les Anglais que nous avions envahis au XIe siècle depuis la Normandie viennent nous libérer 9 siècles plus tard !

Bayeux

Visité la cathédrale Notre-Dame de Bayeux. Elle a un premier niveau roman est un deuxième niveau gothique. Tout est d'une finesse et d'une complexité extraordinaires, une vraie dentelle de Bayeux. Noté que la chapelle où il y a le plus de bougies allumées est la chapelle de la Paix. Le souvenir du débarquement est encore très fort ici.
Dans la foulée, à un jet de pierre, se trouve la Tapisserie de Bayeux. J'ai appris qu'il ne faut pas dire la tapisserie de la Reine Mathilde. C'est Odon, évêque de Bayeux et demi-frère de Guillaume le Conquérant, dit Guillaume le Bâtard (époux de Mathilde), qui aurait commandé cette tapisserie.
Fabuleuse bande dessinée de 70 mètres de long, elle raconte la bataille de Hastings par Guillaume le Conquérant. Elle est accrochée à la hauteur des yeux. Toute la salle est dans l'obscurité, sauf la tapisserie éclairée par quelques lux seulement pour préserver les couleurs. Tout est vivant, animé, en relief, on s'y croirait. Il y a beaucoup d'Anglais, car l'histoire de la Normandie est aussi leur histoire. Ensuite, une exposition très bien faite montre l'invasion de l'Angleterre par Guillaume.